Analyse de Saint Augustin, l’oeuvre d’Antonello de Messina

Publié le : 20 décembre 202129 mins de lecture

Le tableau Saint Augustin faisait partie d’une « icône magna » telle qu’elle avait été définie dans les livres et les documents certifiant la commande à Antonello da Messina. Nous sommes en 1472 et Antonello, après avoir accepté l’œuvre pour une somme d’argent considérable, se prépare à réaliser probablement un polyptyque, appelé « magna icona », dont ce portrait de Saint Augustin faisait partie.

Les autres saints qui ont survécu jusqu’à aujourd’hui et qui sont actuellement exposés au Palazzo Abatellis de Palerme sont Saint Jérôme et Saint Grégoire le Grand. Les autres sont malheureusement perdus.

Saint Augustin et la disposition des autres saints

Dans la disposition originale, le portrait de Saint Augustin devait être placé en haut et à droite, tandis que les deux autres saints devaient être à gauche, toujours en position surélevée.

En fait, si vous suivez le regard de ce saint à la philosophie particulière, vous verrez qu’il regarde vers le bas, à la fois parce qu’il lit le livre sacré dans sa main, mais aussi parce qu’il aurait dû regarder les fidèles de Dieu d’en haut.

Le paradoxe de l’érudit. Jérôme et Augustin dans la peinture du Quattrocento:

Plus équivoque encore apparaît le texte du Saint Augustin de Botticelli, en face. Comme dans la fresque concurrente, tous les livres sont fermés ; celui qui se trouve placé sur le pupitre devant le saint, bien qu’ouvert, ne laisse entrevoir que des signes, indéchiffrables ; et comme chez Ghirlandaio, la lettre que l’évêque d’Hippone écrit à Jérôme ne dépasse guère le simple trait ondoyant. Reste, posé sur l’étagère, juste derrière la tête d’Augustin, l’essentiel : un livre, comme une exhortation, grand ouvert en direction du spectateur. Ce qu’il contient semble bien singulier. Des figures géométriques y sont tracées qui ont permis d’identifier, selon les critiques, soit des théorèmes de Pythagore, soit des problèmes d’Euclide.

Il en va de même pour le Saint Jérôme d’Antonello de Messine, en ce qui concerne le volume que le saint érudit est en train de lire, tandis que dans La Vision de saint Augustin de Carpaccio, où n’apparaissent pas moins de quatre-vingt quatorze livres, chiffre correspondant au bilan de ses écrits que l’évêque d’Hippone dresse dans ses Rétractations Voir Michel Serres, Esthétiques sur Carpaccio, Paris, Hermann, les seuls textes aisément déchiffrables sont, outre le cartellino portant la signature du peintre, les deux partitions de musique, sacrée et profane. Pour une interprétation de cette « lisibilité », voir Laurent…. Trompeurs et illisibles aussi les textes du Saint Jérôme d’Antonio da Fabriano (Baltimore, Walter Art Gallery), tant sur le parchemin accroché sous le sablier que sur le livre qu’il consulte du regard, la seule inscription lisible étant celle de l’auréole avec son nom, comme un signe d’identité.

Bien plus, la concentration dont ils font preuve dans leur tâche et qui, semble-t-il, atteint son paroxysme dans le Jérôme d’Antonello, exclut toute possibilité de contact et renforce leur inaccessibilité. Dans les nombreuses Vision de saint Augustin, l’évêque d’Hippone, en toute logique, regarde l’apparition, qu’elle soit corporelle (Giovanni Mansueti, Filippo Lippi, Luca Signorelli, Francesco Botticini, Lazzaro Bastiani…) ou lumineuse (Carpaccio, Botticelli à Ognissanti…) ; de même, le saint Jérôme de Colantonio est tout occupé à ôter l’épine de la patte du lion dont la présence dans le studiolo, au demeurant, ne laisse pas de surprendre.

En instaurant des « barrières d’illisibilité » entre le spectateur et le saint érudit, les peintures rendaient compte du fait que ce dernier, par son appartenance à la pure intellectualité, au monde des spéculations religieuses comme profanes, ne pouvait se situer au même niveau que le commun des hommes. Comme la nouvelle dévotion incitait à le croire, il se présentait à l’égal de l’humaniste renaissant, dans sa dimension savante autant que sociale et religieuse : inaccessible dans sa pensée, dans son statut, dans sa piété. Du reste, les questions que se posait Augustin lors de sa première Vision comme lorsqu’il rencontra l’enfant sur la plage (béatitudes des saints ravis en Jésus-Christ, mystère de la Sainte Trinité), n’étaient-elles pas inaccessibles dans leur réponse, dénonçant de cette façon la supériorité de la Révélation sur la Raison. De la même manière que la nouvelle piété l’exigeait dans ses pratiques dévotieuses, le saint érudit apparaissait comme un personnage privé, enfermé dans son intimité et par là tournant le dos au reste du monde, à la vanité des agitations humaines généralement liées à la fréquentation de la foule et au monde urbain, dont Pétrarque dans ses écrits avait le premier donné l’exemple du mépris, sinon du rejet. À l’intimité de la pratique religieuse répondait donc l’intimité du travail intellectuel – et réciproquement. Révélateur de ces passerelles entre le monde laïc et le monde clérical était le fait que dans les confréries florentines du xve siècle, des laïcs cultivés, très pieux, et pourvus de solides connaissances des textes sacrés, élaboraient des sermons.

Le contexte

Le fond doré a une saveur archaïque ; cela est dû aux demandes des clients qui ont souvent montré qu’ils avaient une idée différente de la peinture et de ses symboles qu’Antonello, qui était très en avance sur la culture sicilienne de l’époque.

Innovation et compromis

Le maître, en effet, avait affronté les peintres du continent, aimait les peintures des artistes flamands, avait collaboré avec Giovanni Bellini à Venise. L’artiste sicilien avait introduit d’importantes innovations dans la technique du portrait, dans l’utilisation de la perspective, de la profondeur et de l’utilisation de la lumière.

Alors que dans d’autres portraits (couverts dans plusieurs autres articles sur les œuvres d’Antonello da Messina), il s’est montré beaucoup plus audacieux. Dans le travail analysé ici, il a probablement dû accepter les demandes de ses clients.

De plus, la main d’Antonello est visible dans le visage du saint, dans les détails de sa barbe, dans le regard profond et pénétrant, dans les jeux d’ombre et de lumière de sa robe ; dans d’autres parties du tableau, en revanche, on peut voir les interventions d’autres mains.

Détails

Par exemple, les mains de saint Augustin semblent avoir été faites par une main inexpérimentée ; les pierres précieuses sur le couvre-chef d’Augustin sont approximatives et opaques ; elles n’ont rien à voir avec les pierres précieuses du portrait de la Vierge Salant, où les pierres précieuses apparaissent dans toute leur brillance et leur splendeur.

Il est donc probable qu’un de ses collaborateurs, ou son fils Jacobello, ait mis la main sur le tableau et l’ait achevé.

Cela est d’autant plus probable si l’on pense qu’Antonello était à l’époque un peintre très célèbre et très contesté : il avait de nombreuses œuvres dans la cour, commandées, à terminer.

Antonello de Messine, né vers 1430 à Messine en Italie où il meurt en février 1479, est un peintre italien de la Renaissance.

Formation et premières années

Antonello de Messine est le fils de Giovanni de Antonio, magister mazonus (« maitre maçon ») et de Garita (Margherita). Une lettre de l’humaniste napolitain Pietro Summonte au gentilhomme vénitien Marcantonio Michiel présente Antonello comme un élève du peintre Antonio Colantonio, établi à Naples : « Celui-ci [Colantonio] n’arriva pas, faute de temps, à la perfection du dessin des choses antiques, comme y arriva son disciple Antonello de Messine » (Costui [Colantonio] non arrivò, per colpa delli tempi, alla perfezione del disegno delle cose antique, sì come ci arrivò lo suo discepolo Antonello da Messina). Cet apprentissage se situe probablement entre 1445 et 1455. Naples est alors un point de convergence artistique (et parfois politique) des grands maîtres flamands et catalans.

L’artiste

Produit en France entre 1275 et 1325 avec des passages d’Augustin d’Hippone, disponible sur SOMNI

En 1457, Antonello travaille pour son propre compte, puisqu’en mars il reçoit la commande d’un étendard pour la confrérie de San Michele dei Gerbini de Reggio de Calabre. En 1460, il est de retour à Messine.

La Vierge de l’Annonciation du Museo Civico de Côme, la Madone Forti (Venise, collection particulière) et la Madone Salting (Londres, National Gallery) sont les premières œuvres communément attribuées au jeune Antonello. Dès ses premières œuvres, il affirme une personnalité suffisamment forte pour assimiler avec profit les apports extérieurs les plus variés. Relativement peu marqué par la tradition locale, il fera toujours preuve, en fait, de la plus grande originalité. La peinture flamande, en particulier celle de Jan van Eyck et celle de Petrus Christus, a une forte influence sur lui, notamment sur sa pratique du portrait, dont il est le plus grand représentant en Italie de son vivant.

Entre 1474 et 1476, il se rend à Venise : ce séjour est considéré comme le sommet de sa carrière et revêt une grande importance pour l’ histoire de la peinture vénitienne. Il y peint notamment le Retable de San Cassiano, aujourd’hui fragmentaire, considéré comme le prototype de la Sacra conversazione à la vénitienne.

A Venise, Antonello se montre original avec le Saint Jérôme dans son cabinet de travail (1475, Londres, National Gallery). Il a assimilé les principes de la perspective florentine et la minutie et le sens du détail flamand. La pureté et la luminosité de son œuvre, ainsi que la fermeté de dessin lui valent un prestige considérable.

Le Condottiere (1474-1476, Paris, musée du Louvre) reste le portrait le plus énergique, le plus volontaire, montrant toute la détermination du portraituré. L’équilibre, l’ampleur, la rigueur, et la plénitude sont servis par des chromatismes qui devancent les trouvailles d’un Giorgione. D’autres portraits d’Antonello célèbres pour leur forte caractérisation psychologique sont celui dit du marin, conservé à Cefalù (au Museo Mandralisca), et le portrait Trivulzio, à la Galerie Sabauda de Turin, où l’ironie et la malice de l’expression des portraiturés donne vie aux modèles.

La sobriété et la modernité de la composition de La Vierge de l’Annonciation, peinte fort probablement circa 1475, en font une œuvre majeure de la Renaissance italienne (palais Abatellis, Palerme), toute en retenue et en sobriété.

Rentré à Messine, Antonello livre son testament au début de l’année 1479. Son fils, Jacobello, reprendra son atelier et honorera ses contrats.

« Saint Augustin dans son étude » réexpédie ici. Pour la peinture du même nom par Botticelli, voir saint Augustin dans son étude (Botticelli) .

Saint-Augustin dans son atelierArtisteVittore CarpaccioAnnée1502MoyenTempera sur panneauDimensions141 cm x 210 cm (56 pouces x 83 pouces)EmplacementSan Giorgio di scuola degli Schiavoni , Venise

Saint – Augustin dans son étude (aussi appelée Vision de saint Augustin ) est un tableau de l’artisteRenaissance italienne Vittore Carpaccio logé dans la Scuola di San Giorgio degli Schiavoni de Venise ,nord Italie .

Les travaux dates à la maturité de Carpaccio, quand il a été appelé par la « Scuola » (guilde ou société) de la Schiavoni (Dalmatiens) à exécuter un cycle de sept tableaux sur les histoires des saints patrons (George, Jérôme et Tryphon) et évangélique épisodes. Les travaux ont commencé en 1502 et a été achevée en 1507.

Esquisse préparatoire par le British Museum, où le chien est substitué par un chat, ou peut – être plus probablement une belette ou hermine

Le travail dépeint l’épisode traditionnel de saint Jérôme apparaissant à saint Augustin d’annoncer sa mort imminente et le départ au Ciel. Carpaccio dépeint le saint africain dans son atelier, au moment où il est distrait de sa lecture par la voix de Jérôme, venant comme une forme lumineuse dans la fenêtre près du bureau. La chambre est typique que d’un humaniste acculturés de l’âge du peintre, représenté avec son attention habituelle aux détails.

La chambre est à peu près rectangulaire, avec un plafond peint. Augustin assis sur un banc sur un tampon, recouvert de tissu vert et garni de crampons; le bureau est pris en charge par un candélabre . Certains des livres montrent des lignes musicales. Sous la fenêtre sont un fichier et un sablier. D’ autres éléments représentés comprennent des instruments de mesure, écrins précieux, une cloche, une coquille, une sphère armillaire , des vases, des bouteilles et autres.

Au centre est une niche avec un autel, où, comme le montre le rideau déplacé de côté, sont des objets liturgiques de saint Augustin: une veste, une mitre , la crosse et un encensoir qui pend près de deux candélabres. Du côté des autels sont deux portails jumeaux, avec des décorations fines dans le style Renaissance. Celui de gauche est ouverte, et montre une petite pièce avec une fenêtre, selon le goût de différentes sources d’éclairage inspirées par la peinture flamande : c’était devenu populaire à Venise après son utilisation par Antonello da Messina dans les peintures telles que Saint – Jérôme dans son étude qui Carpaccio pourrait peut – être observer et étudier. Voici un certain nombre d’ autres détails: une table avec trois couples de jambes croisées et recouvert d’une nappe rouge, d’ autres livres, et, sur une étagère en cours d’ exécution pour le périmètre de la pièce, plusieurs instruments scientifiques et astronomiques, y compris Regiomontanus de astrolabe qui, à l’époque, était la propriété que par John Bessarion , et est susceptible d’avoir inspiré Carpaccio pour la représentation du saint.

Sur les deux longues étagères gauche, le logement plus de livres avec des couvertures criardes, une série d’antiquités (vases, bronze et autres), un sous – sol de bougie en forme de patte de lion (un autre est placé de façon symétrique sur le mur opposé) et, ci – dessous, de grands volumes , un siège et un prie-Dieu . Au centre de la salle est un Spitz allemand chien et, à proximité, une cartouche avec la signature de l’artiste et la date.

Antonello de Messine, né vers 1430 à Messine en Italie où il meurt en février 1479, est un peintre italien de la Renaissance.

La légende d’Antonello par Vasari

Une légende encore tenace, quoique démentie depuis longtemps, attribue à Antonello la paternité de l’usage de la peinture à l’huile en Italie. Celle-ci trouve sa source au xvie siècle dans Le Vite de Giorgio Vasari4. Le biographe raconte qu’Antonello serait un jour tombé en extase devant un tableau de Jan van Eyck de la collection du roi Alphonse à Naples. Toutes affaires cessantes, il serait parti pour Bruges rencontrer le maître, duquel il aurait obtenu, en gagnant son amitié et sa confiance, le secret de la peinture à l’huile. Il ne serait retourné à Messine, puis à Venise, qu’après la mort de celui-ci, « pour doter l’Italie de son précieux secret », qu’il aurait alors transmis à Maestro Domenico.

Le caractère purement romanesque de cette anecdote ne fait aujourd’hui aucun doute, mais, de même que la légende de l’invention de la peinture à l’huile par Jan van Eyck, racontée par Vasari dans cette même « Vie d’Antonello de Messine », elle n’en a pas moins été largement relayée au fil des siècles.

Influences flamandes

L’influence de la peinture flamande sur Antonello de Messine est indéniable. Celle-ci était admirée par les rois de Naples, du roi René à Alphonse d’Aragon, qui possédait la plus importante collection d’œuvres de Jan van Eyck et de Roger van der Weyden, à une époque où Naples était un grand centre politique et culturel.

Antonello n’apporte certes pas la technique à l’huile, déjà connue des Italiens, mais il familiarise ses concitoyens à certains de ses effets exploités par les maîtres flamands, notamment la transparence des couleurs. De plus, il est un des premiers peintres italiens à reprendre le modèle du portrait de trois-quart illustré par van Eyck, avec cadrage élargi et fond abstrait généralement noir6, tout en développant le goût pour les petits formats7.

Antonello de Messine dans la littérature

Dans son roman Au temps où la Joconde parlait, paru en 1993 aux éditions J’ai lu, Jean Diwo s’inspire de la biographie inventée par Vasari pour faire du peintre italien un des précurseurs de la Renaissance. Il développe notamment l’idée du voyage d’Antonello en Flandre pour faire la rencontre de Jan van Eyck, qui lui apprend la technique de peinture à l’huile utilisant la térébenthine comme solvant. De retour de sa quête, il peint sa Vierge de l’Annonciation (vers 1476-1477). Une telle affirmation étant bien évidemment sans fondement historique, puisque van Eyck est mort en 1441.

Georges Perec a consacré son premier roman, Le Condottière (rédigé en 1957-1960, parution posthume 2012) à un faussaire perdant la raison à force de s’acharner sur sa copie du Condottiere d’Antonello.

Paru récemment aux éditions Plon, l’ouvrage de François Cérésa Antonello, Léonard de Vinci et moi8 restitue une figure haute en couleur et émouvante de ce peintre et de l’univers dans lequel il a vécu.

– Antonello de Messine, Portrait d’homme, dit « Le Condottiere », 1475, Paris, Musée du Louvre

Le tableau est peint sur un panneau de bois, sans doute du peuplier, de 0,364 m de haut et 0,300 m de largeur (dimension de la surface peinte h. 0,34 m ; l. 0,28 m.). Le panneau est aminci et vermoulu, ce qui gêne les radiographies. Celles-ci révèlent quelques lacunes essentiellement sur la joue et le cou. La couche picturale n’a apparemment pas été restaurée depuis son acquisition par le Louvre.

Ce tableau fut acquis par le Louvre le 1er avril 1865 lors de la vente de la galerie du comte de Pourtalès-Gorgier pour 113 500 francs, somme très importante pour l’époque. Ce tableau figurait déjà dans le catalogue de la collection de ce comte en 1841. Le comte de Pourtalès-Gorgier, d’après une copie manuscrite du journal de sa petite-fille la Baronne de Berckheim conservée au Service d’étude et de documentation du département des Peintures[2], aurait lui-même acheté le tableau lors d’un de ses voyages en Italie du Nord à un « vieux curé » pour la somme très faible de 750 francs.
Par ailleurs, ce tableau passait pour avoir été vu à Venise à vendre vers 1835 pour un prix bien inférieur à celui acquitté par le Louvre, selon une lettre en 1865 du peintre Victor Mottez à un de ses amis[3].

L’influence d’Antonello de Messine

Le designer industriel québécois Michel Dallaire s’inspirera de la peinture Saint Jérôme dans son cabinet de travail d’Antonello de Messine pour le design de l’ameublement de la Grande Bibliothèque de la société d’État Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Montréal.

L’Afrique vues par saint Augustin:

Il existe des deux Afriques chères à Christian Courtois, mais que bien des nuances doivent être apportées à sa vision des choses.

Pour Augustin et ses contemporains, deux blocs s’opposaient. À l’Est, les provinces de Proconsulaire, de Byzacène et de Numidie constituaient la véritable Afrique romaine, l’authentique Africa (qui allait devenir l’Ifriqiia), s’étendant de la mer au Sahara. Son particularisme dans l’Empire était évident ; ainsi on pouvait considérer comme peu romanisés les paysans punicophones vivant dans leurs castella, soit des bourgs semi-autonomes ; pourtant, ils étaient intégrés dans le système commun, politique, municipal (ils relevaient d’une cité), juridique (ils ne possédaient pas de ius gentis).

Il en était ainsi, on l’a vu, pour les habitants des Hautes Plaines de la Numidie, qu’Augustin s’obstinait pourtant à appeler Gétules. On ne connaît pas parmi eux de structures tribales, bien qu’il y en ait probablement existé dans le sud de la Byzacène et de la Numidie, en tout cas au sud de l’Aurès. La transposition par Courtois de la situation maurétanienne dans ces provinces de l’Est ne doit pas être retenue. En revanche, en Maurétanie Césarienne (et en Tingitane évidemment), la romanisation se limitait à des secteurs limités, entourés par un monde tribal qui lui restait étranger, ce dont Augustin et Aurelius avaient une claire conscience. L’autorité romaine ne s’exerçait que sur le Tell, et les Hautes Plaines restaient extérieures à l’Empire : le barbaricum était donc toujours proche, comme le constatait Aurelius de Carthage.

On peut cependant observer que ces îlots de romanité pouvaient être solides et durables : les inscriptions révèlent l’usage du latin, le christianisme et, probablement, une structure de type municipal, à Volubilis ou à Altava jusqu’au viie siècle, au temps de la conquête arabe. La Notitia de 484 n’énumère pas moins de 123 sièges épiscopaux en Maurétanie Césarienne, et 44 pour la petite Maurétanie Sitifìenne. Il ne faut donc pas confondre la réalité avec la vision entachée de préjugés et d’idées reçues qu’on avait à Carthage ou à Hippone d’une Maurétanie presque entièrement barbare. Il reste que les invasions “maures” du VIe siècle (dont celle de tribus syrtiques restées païennes, qui allaient se convertir à l’Islam dès le viie siècle et participer à la conquête arabe) allaient manifester que la sécurité dans laquelle avaient vécu les habitants des riches provinces de l’Est était précaire, davantage même qu’Augustin ne l’avait pensé, et que le faible souci, de la part des évêques, de la christianisation de ces peuples extérieurs avait eu de graves conséquences.

Saint-Benoît (1472-1475 ca), huile sur peuplier, 105 cm × 43,5 cm, Milan, Castello Sforzesco, Civiche Raccolte d’Arte.

Benoit XVI:

Aux méditations sur les Pères de l’Eglise et parler aujourd’hui du plus grand Père de l’Eglise latine, saint Augustin:  homme de passion et de foi, d’une très grande intelligence et d’une sollicitude pastorale inlassable, ce grand saint et docteur de l’Eglise est souvent connu, tout au moins de réputation, par ceux qui ignorent le christianisme ou qui ne le connaissent pas bien, car il a laissé une empreinte très profonde dans la vie culturelle de l’Occident et du monde entier. En raison de son importance particulière, saint Augustin a eu une influence considérable et l’on pourrait affirmer, d’une part, que toutes les routes de la littérature chrétienne latine mènent à Hippone (aujourd’hui Annaba, sur la côte algérienne), le lieu où il était Evêque et, de l’autre, que de cette ville de l’Afrique romaine, dont Augustin fut l’Evêque de 395 jusqu’à sa mort en 430, partent de nombreuses autres routes du christianisme successif et de la culture occidentale elle-même.

Rarement une civilisation ne rencontra un aussi grand esprit, qui sache en accueillir les valeurs et en exalter la richesse intrinsèque, en inventant des idées et des formes dont la postérité se nourrirait, comme le souligna également Paul VI:  « On peut dire que toute la pensée de l’Antiquité conflue dans son œuvre et que de celle-ci dérivent des courants de pensée qui parcourent toute la tradition doctrinale des siècles suivants » (AAS, 62, 1970, p. 426). Augustin est également le Père de l’Eglise qui a laissé le plus grand nombre d’œuvres. Son biographe Possidius dit qu’il semblait impossible qu’un homme puisse écrire autant de choses dans sa vie. Nous parlerons de ces diverses œuvres lors d’une prochaine rencontre. Aujourd’hui, nous réserverons notre attention à sa vie, que l’on reconstruit bien à partir de ses écrits, et en particulier des Confessions, son extraordinaire autobiographie spirituelle, écrite en louange à Dieu, qui est son œuvre la plus célèbre. Et à juste titre, car ce sont précisément les Confessions d’Augustin, avec leur attention à la vie intérieure et à la psychologie, qui constituent un modèle unique dans la littérature occidentale, et pas seulement occidentale, même non religieuse, jusqu’à la modernité. Cette attention à la vie spirituelle, au mystère du « moi », au mystère de Dieu qui se cache derrière le « moi », est une chose extraordinaire sans précédent et restera pour toujours, pour ainsi dire, un « sommet » spirituel.

Peter Robert Lamont Brown, né le 26 juillet 1935 à Dublin (Irlande), est un historien spécialiste de l’histoire romaine et de l’Antiquité tardive.

L’Antiquité tardive est une expression utilisée pour désigner une période de l’histoire européenne qui commence à la fin du IIIème siècle mais dont le terme est beaucoup plus flou. Elle n’est employée qu’en référence aux pays ayant appartenu au monde romain : les régions d’Europe occidentale, orientale et méridionale, d’Asie et d’Afrique autour du bassin méditerranéen mais se prolonge bien au-delà de la fin de l’Empire romain d’Occident en 476.

Saint honore

Le saint-honoré est une pâtisserie française, à base de crème Chantilly, de crème Chiboust et de petits choux glacés au sucre.

Selon les pâtissiers Pierre Lacam et Antoine Charabot1, le saint-honoré a été créé par le pâtissier parisien Chiboust en 18402, en s’inspirant d’un dessert bordelais appelé « flan suisse »3. Il a donné à son gâteau le nom de la rue Saint-Honoré, où son commerce était installé, rendant du même coup hommage à saint Honoré, huitième évêque d’Amiens, et patron des boulangers.

Le faubourg Saint-Honoré est un des anciens faubourgs de Paris. Il s’articule autour de son artère centrale, la rue du Faubourg-Saint-Honoré, elle-même un prolongement de la rue Saint-Honoré. La rue du Faubourg Saint-Honoré constituait anciennement la partie extra muros (à l’extérieur des murs de Paris) de la rue Saint-Honoré.

Adéodat (372 – c. 391)

est le fils d’Augustin d’Hippone. Il est né avant la conversion de celui-ci des amours avec une concubine restée anonyme. Il est baptisé à Mediolanum en 387 par saint Ambroise, en même temps que son père, avant de décéder quelques années plus tard. Saint Augustin évoque sa mémoire dans les Confessions, après l’avoir mis en scène dans un dialogue philosophique intitulé De magistro

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